Par Aymeric Engelhard
Quand le réalisateur de « La Chute du Faucon noir » et d’ «American Gangster » s’associe au scénariste oscarisé des « Infiltrés », cela donne « Mensonges d’Etat ». Un thriller d’espionnage aux prises de position pro-américaines totalement assumées, un film d’espionnage traitant du terrorisme au Moyen-Orient dans sa plus terrible vérité.
Depuis les attentats du 9/11, les films sur le terrorisme envahissent la toile avec une violence surprenante. L’année dernière on peut recenser entre autres « Dans la Vallée d’Ellah », « Le Royaume », « Redacted », « Détention Secrète » ou encore « Lions et Agneaux ». Que des films à gros budget où la langue de bois semble quelque peu interdite. « Mensonges d’Etat » entre dans la liste sans complexe avec peut-être un avantage sur les autres : son réalisateur Ridley Scott. « Alien », « Blade Runner », « Gladiator », « La Chute du Faucon noir » et « American Gangster » c’est lui. Un sens inné du spectaculaire, un directeur d’acteur intraitable, Scott place toujours la barre bien haute. Britannique, le metteur en scène place son regard sur les services secrets américains au Moyen-Orient et sur les attentats perpétrés par les terroristes en Europe. Il créé des actions d’Al Quaida fictives contre Londres et Amsterdam notamment. Ainsi le spectateur suit Roger Ferris, agent de la CIA, dans ses différentes infiltrations. Le film s’appuie sur les réseaux très complexes et secrets d’un système aux rouages sinueux. La confiance est un risque à prendre mais la suite se joue à la roulette russe, le titre du métrage nous le fait comprendre dès le départ. Les conséquences pour Ferris auraient pu s’avérer catastrophiques…
Torture, châtiment, combat urbain comme dans le désert, « Mensonges d’Etat » se veut riche en images puissantes et réalistes. Mais ce n’est pas un film d’action, ce n’est que la partie immergée de l’iceberg que la bande-annonce et la promo ont voulu montrer pour le vendre. « Mensonges d’Etat » est intéressant dans sa plongée au cœur des réseaux islamistes. Cette terrifiante vérité, cause de nombres de peurs aujourd’hui. Le cinéma se veut révolté et dans ce sens là « Mensonges d’Etat » est un faux divertissement. Il y va fort, montre les choses telles qu’elles sont sur place, fait le contraste entre ceux qui restent tranquillement derrière leur écran et ceux qui subissent ou se battent chaque jour en enfer. C’est ce contraste là que soulignent les personnages antagonistes joués par Leonardo DiCaprio et Russel Crowe. L’un est sur le terrain, réfléchit vite et est confronté au feu tous les jours. L’autre est au pays, donne les directives, ne se rend pas compte de ce que subit l’autre. Ainsi, sur une erreur de jugement de Crowe, DiCaprio va se retrouver confronté à la torture pure et dure sous le regard « youtubien » d’un caméscope. « Mensonges d’Etat » doit beaucoup à William Monahan, son scénariste, déjà à l’œuvre sur le quadruple oscarisé « Les Infiltrés » de Scorsese. Il crée un script au cordeau, intelligent et travaillé. Monahan confirme sa grande valeur au pays du scénario à Hollywood. Et au niveau des belles valeurs on trouve aussi un Leonardo DiCaprio qui signe peut-être sa meilleure prestation depuis « Les Infiltrés » justement. Il a bien grandi le fringuant beau gosse de « Titanic ». Quant à Russel Crowe, on dirait que sa bedaine a eu raison de lui. Fini le corps svelte de Maximus dans « Gladiator », aujourd’hui Crowe a du bide et ses rôles perdent en intensité. Cela n’empêche pas son extrême qualité. Maximus est quand même en dessus de DiCaprio qui, lui, y croit à mort. Si bien que l’acteur en prend plein la figure à l’image d’un film violent et impeccablement monté. « Mensonges d’Etat » est l’un des très bons coups de l’année, Ridley Scott est toujours l’un réalisateur des plus grands. Et puis faire un film mi action/mi politique sur le terrorisme comme cela montre que le cinéma peut se faire porte-parole d’un sentiment international des plus importants. Chapeau !