Gertrude Stein, Pablo et Paul Picasso, les Marcatier et Alice Toklas à Billignin en 1931
Par Alain Vollerin
Le Bugey, la Guerre d’Août 1924 à Décembre1944. Pourquoi ce livre me plaît-il autant depuis que son auteur, Dominique Saint-Pierre me l’a offert, et dédicacé ? D’abord le volume est agréable. Il est très présent par un certain poids qui fait qu’on aime le prendre et le garder en mains.
Gertrude Stein était d’abord pour moi un nom, un souvenir, un moment fort de l’aventure de la Modernité dans le domaine des arts plastiques. Avec son frère, Léo Stein, elle avait commencé une collection des génies qui modifièrent définitivement l’histoire de l’art au début du XXe, Henri Matisse, Marcel Duchamp, Francis Picabia qui fit les portraits de Gertrude et Alice, mais aussi, Paul Cézanne dont elle possédait le Portrait de Mme Cézanne qu’elle avait acheté chez Amboise Vollard, Charles Henri Ford poète, éditeur, photographe, cinéaste, ou, Pablo Picasso qui vint un jour lui rendre visite dans cette maison de Billignin près de Belley dans l’Ain où l’attendait l’auteur de l’autobiographie d’Alice Toklas, un texte qui révolutionna le monde de la création littéraire. Son influence est encore très sensible auprès des jeunes écrivains et poète de l’avant-garde contemporaine à l’aube du XXIe siècle, comme en témoigne la fascination de son "Théâtre" dans l’esprit des concepteurs de la revue "Avant Poste". Dans cette maison modeste, Gertrude Stein a reçu d’innombrables artistes : Francis Rose, un peintre écossais à qui elle acheta cent-trente peintures et qui recevra la responsabilité de choisir la pierre de sa tombe au cimetière du Père Lachaise, Daniel Rops, le photographe Cecil Beaton, le sculpteur Jacques Lipchitz, l’écrivain René Tavernier, père de Bertrand. Comment pourrais-je oublier la visite d’André Breton et de ses amis surréalistes : Yves Tanguy et Roberto Matta. Pour dire l’immense ouverture d’esprit de Gertrude Stein et d’Alice Toklas, il suffit de souligner qu’elles furent les protectrices de Pierre Balmain, et participèrent à l’ouverture de sa maison de couture à Paris en septembre 1945.
Elles surent aussi tout au long de leur présence dans le département de l’Ain se faire apprécier par tous les habitants, ce qui permet à Dominique Saint-Pierre d’analyser et de transmettre une image précise et indispensable à nos yeux de toute une population d’où surgissent des personnalités comme : Mr Lenormand qui épousa une descendante de Mme Récamier, Amand Saint-Pierre, notaire de Gertrude, les Pernolllet qui tenaient une auberge proposant une cuisine issue d’une admiration pour les théories de Curnonski, et bien entendu, dans le respect des écrits du célèbre voisin Brillat-Savarin. Dominique Saint-Pierre est un chercheur qui vit dans les profondeurs oubliées des bibliothèques, là où se trouvent des trésors de documentations inestimables. Ce livre est une performance qui ne nous étonne pas de la part de l’auteur du « Dictionnaire des hommes et des femmes politiques de l’Ain » qui fut aussi le secrétaire de l’association culturelle qui fit tant à Lacoux autour de la haute stature du pharmacien et critique d’art, René Deroudille et du peintre Fred Deux. Cet ouvrage vaut aussi pour les Lyonnais, pour l’amitié de Gertrude avec des personnalités comme Paul et Pierre Genin. A Billignin, Gertrude et Alice accueillirent " l’amazone" Nathalie Barney qui fut l’amie de Rémy de Gourmont, et l’inspiratrice au plan sexuel de plusieurs femmes libérées de l’époque, comme Elisabeth de Gramont, avec laquelle, elle rendit visite à Gertrude Stein. Les opinions politiques de Gertrude étaient celles d’une majorité de la population française. Elle était pétainiste. Peut-être sous l’influence de son ami le plus précieux Bernard Faÿ dont les liens amicaux ne se désunirent jamais. Une exception, car nous découvrons que Gertrude Stein était assez volatile en amitié. Nous nous réjouissons d’apprendre qu’une exposition rétrospective se prépare actuellement aux Etats-Unis, qu’elle viendra ensuite en Europe et que cet ouvrage sera à côté du catalogue officiel, une des références qui l’accompagneront pendant son périple. 390 p. Format : 220 x 160 mm. Nombreuses photos et illustrations, avec une préface d’Edward Burns, professeur à l’université William-Patterson du New-Jersey (27€).
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