Par Aymeric Engelhard
Un nouveau feu brûle au sein de la maison Disney. Alors que le précédent semblait plutôt la précipiter dans les enfers, celui-ci la fait renaître avec force. Grâce à une princesse, une grenouille et beaucoup de magie, le roi du dessin animé signe un retour fulgurant dans la tradition de ses plus grands films.
L’animation traditionnelle a bien failli se perdre. Avec cette 3D qui n’ajoute pas grand-chose au plaisir procuré par un film et ces images de synthèse qui évoluent trop rapidement, l’animation semblait prendre des voies un peu trop tape-à-l’œil. Seul le studio Pixar parvient à associer beauté visuelle et émotion. Depuis que le boss de Pixar a été promu directeur de Walt Disney Feature Animation, on ne peut que s’attendre qu’à mieux. John Lasseter est un grand enfant et, comme tout le monde, (sauf les fous de technologie) l’animation traditionnelle lui manquait. « La princesse et la grenouille », c’est surtout le résultat d’un enchaînement d’excellentes décisions. Tout d’abord Lasseter a bataillé sec pour imposer ce retour à l’animation en 2D car cela réclamait aux animateurs de revenir aux crayons et papiers. Dans une industrie qui ne jure que par le numérique, ce n’était pas gagné. Ensuite il a eu la merveilleuse idée de faire revenir au bercail les deux génies réalisateurs de « La petite sirène », « Aladdin » et « Hercule ». Ron Clements et John Musker peuvent se féliciter d’avoir mis en scène quelques-uns des plus beaux fleurons de l’histoire du dessin-animé. Leur dernière œuvre ne créée pas l’exception. Elle a tout d’un futur classique. « La princesse et la grenouille » se déroule dans la Nouvelle Orléans des années 20. C’est l’histoire d’une femme qui embrasse un prince transformé en grenouille par un méchant sorcier vaudou. Sauf que ce n’est pas le batracien qui redeviendra humain mais bien l’humaine qui prendra la forme d’une petite grenouille. Les deux amphibiens partent alors à la recherche de Mama Odie, une magicienne susceptible de leur redonner leur véritable forme. Mais pendant ce temps, le terrible sorcier vaudou n’a pas dit son dernier mot…
Pour une première c’est une première ! Tiana entre par la grande porte dans le cercle très fermé des princesses Disney. Elle rejoint Jasmine (« Aladdin »), Aurore (« La Belle au bois dormant »), Belle (« La Belle et la Bête ») ou encore Blanche-Neige. Mais c’est un évènement car la nouvelle a la peau noire ! Décision prise bien avant l’élection d’Obama (donc sans rapport), elle marque un changement important. D’autant que cette princesse s’avère d’une grande beauté. Elle se voit accompagnée de personnages aussi drôles que réussis. Du prince Naveen (la classe) à Louis (l’alligator jazzy) en passant par Ray (une luciole complètement allumée), tous les second-rôles trouvent le moyen de nous émerveiller. Et comme l’ensemble du long-métrage ils bénéficient d’un coup de pinceau plein de maîtrise. La firme aux grandes oreilles retrouve tout ce qui faisait son charme avant la 3D. Elle avait mis sous clef les chansons et les contes. Ici ces derniers reprennent leur place initiale pour un plaisir certain (ah l’ambiance jazzy…). De plus, Disney renoue avec sa volonté d’enjouer un public plus adulte. Ainsi le grand méchant (le sorcier vaudou Facilier) s’inscrit dans la tradition des Jafar et autre Ursula en usant de forces obscures dont les esprits feront surement pâlir les plus jeunes. Inspiré de Michael Jackson, Facilier c’est l’explosion d’une bête de pellicule que l’on aurait finalement préféré voir plus longtemps. Sans être un chef d’œuvre, « La Princesse et la Grenouille » constitue un film particulièrement maîtrisé. Disney redevient le grand distributeur de rêves d’antan, et qu’est-ce que ça fait du bien d’aller au cinéma pour rêver !