Par Aymeric Engelhard
Décidément, Clint Eastwood n’en finit plus d’éblouir. S’il avait déjà arboré les sentiers du drame difficile avec brio dans « Mystic River », il explose complètement le genre avec son « Changeling » (L’Echange en VF) et entre une bonne fois pour toutes dans le panthéon des plus grands réalisateurs de tous les temps.
« L’Echange » s’est fait remarquer à Cannes cette année. Malheureusement non pas pour ses qualités de film mais pour son réalisateur qui a reçu le prix spécial du festival avec Catherine Deneuve. Pourtant il est à penser que « L’Echange » aurait bien mérité une récompense digne de ce nom. C’est un drame racontant le combat mené par une mère, Madame Collins (Angelina Jolie), pour retrouver son fils qui a disparu. Elle est réceptionniste et a du mal à s’occuper de son fils aussi bien qu’elle le devrait. De plus elle vit seule avec lui. Un soir alors qu’il a disparu, elle fait appel à la police. Celle-ci lui ramène au bout de plusieurs mois un enfant qui s’avère ne pas être le sien. Malgré son acharnement pour prouver cette erreur, Madame Collins fait face à une police bien plus intéressée par son image que par la finalité de ses enquêtes. Une erreur passerait mal auprès des journalistes et elle est aussitôt envoyée en hôpital psychiatrique. « L’Echange » a la prétention de montrer des forces de police honteuses dans un milieu pourri par toutes sortes de corruptions. Il s’agit là de la trame principale, ponctuée par ces scènes d’hôpital psychiatrique où Angelina Jolie explose à l’écran. Mais parallèlement le film se décale sur une autre histoire bien plus sombre qui dépeint l’enquête d’un détective à la recherche d’un adolescent ayant quitté le Canada illégalement. Il découvre alors un serial killer spécialisé dans les coups de hache sur les enfants. Cette séquence fait littéralement froid dans le dos – c’est à la limite du soutenable – et change le cours du film. Le drame se transforme en thriller et l’histoire va atteindre un niveau émotionnel rarement vu. La somptueuse performance d’Angelina Jolie couplée à la perfection de la réalisation fait de « L’Echange » un tire-larme d’une grande efficacité. Car il faut bien se rendre à l’évidence à force : Clint Eastwood n’est pas un grand réalisateur, il est immense. Sa mise en scène a atteint une telle perfection… Christopher Nolan a sacrifié tout autre réalisateur sur l’autel du blockbuster avec « The Dark Knight », Clint Eastwood fait de même en arborant tous les genres. De plus il donne à Angelina Jolie ni plus ni moins son meilleur rôle, l’actrice est absolument bouleversante. Ses larmes sont contagieuses et ses cris de désespoir terriblement vrais. Associés à elle, John Malkovitch et le trop méconnu Michael Kelly sortent aussi le grand jeu. Mais Angelina Jolie mériterait l’Oscar, c’est clair et net. De toute façon « L’Echange » est un film à Oscar et certainement l’un des meilleurs prétendants pour le millésime 2009.