Par Aymeric Engelhard
007 retrouve son permis de tuer pour une vingt-troisième aventure que l’on espérait digne de ce nom. Depuis la débâcle « Quantum of Solace », James Bond avait à cœur de se montrer sous son meilleur jour. Il fallait du neuf avec du vieux, retrouver l’esprit de la saga. Et après plusieurs années d’un développement houleux, on peut le crier haut et fort : on ne pouvait rêver meilleur Bond que le passionnant et passionné « Skyfall » !
Le plus célèbre des agents secrets fête ses 50 ans en 2012. Un demi-siècle de loyauté envers sa gracieuse Majesté se doit de passer par une vingt-troisième mission dont on se souviendra autant que « Goldfinger » ou « Opération Tonerre ». Et pour cela les producteurs n’ont pas fait les choses à moitié. Déjà Sam Mendes est certainement le plus grand réalisateur à se retrouver aux commandes d’un épisode. Bien que britannique, ses travaux en profondeur sur les Etats-Unis (« American Beauty », « Jarhead » et « Les Noces Rebelles » pour ne citer qu’eux) ont fait sa réputation. Il transcende tout ce à quoi il touche, sans imposer de style particulier mais avec toujours cette perfection dans l’image couplée à une maîtrise psychologique hors norme. Il creuse.
Et James Bond a besoin d’être creusé justement après toute la virilité qu’il a déployé dans sa vendetta du dernier volet. Cela passe par un retour aux sources particulièrement bienvenu. Moneypenny, Q, Aston Martin DB5… « Skyfall » pose les bases de ce qui avait été annoncé depuis « Casino Royale », soit la réinitialisation de la saga. On ne compte pas clins d’œil appuyés à la période Sean Connery tandis que paradoxalement on assiste à la mise en place de l’univers que l’on a toujours connu de « Dr No » à « Meurs un autre jour ». Mendes s’approprie parfaitement la galaxie Bond tout en l’incluant dans un contexte très actuel et sacrément mature. Le MI6 est une cible terroriste, la loyauté des agents se voit largement remise en cause tout comme l’efficacité de M, Bond picole et aime la mort… Il évite au passage de faire du Jason Bourne comme la plupart des films d’action de ces dernières années.
D’ailleurs niveau action, cet épisode se révèle assez avare mais au vu de l’efficacité des quelques scènes proposées, c’est préférable. On regrettera seulement détonants effets numériques ratés pour cacher des doublures ou mettre en scène des animaux dangereux quand à côté de cela « Skyfall » recèle certainement l’une des plus belles explosions de la saga sans le moindre rajout virtuel. Tout ce qui est fait en « vrai » se révèle somptueux. Le film est soutenu par la lumière en tout point fabuleuse de Roger Deakins et la musique de Thomas Newman constitue un véritable bijou avec comme diamant brut l’extraordinaire générique chanté par Adèle.
Daniel Craig signe de loin sa meilleure partition, réussissant à percer son personnage comme jamais tout en retrouvant l’humour de ses aînés, et Javier Bardem fait le show en méchant décomplexé. Pas de véritable « James Bond girl » mais certainement l’une des plus belles pages bondiennes offertes à Judi Dench en M, icône depuis « Goldeneye » qui trouve ici le point d’orgue de son histoire avec l’agent 007. La marque Mendes surement qui achève de faire de « Skyfall » peut-être le plus beau « James Bond » jamais réalisé.