Par Alain Vollerin
Il manque une dimension déterminante dans ce lieu aseptisé. La misère. Les abjectes conditions de vie de tout un peuple. Les maladies dont on mourrait dans d’infects galetas. La violence des alcooliques. Les meurtres à l’arme blanche innombrables. L’absence d’hygiène.
Suzanne était une petite cochonne. Une Marie couche toi là. Tous ses amis peintres en profitèrent allègrement. Dans ses derniers jours, avinée à l’extrême, elle courrait les rues à la recherche de clochards à mettre dans son lit. Pendant ce temps là, son fils Maurice, qui avait heureusement épousé Lucie Valore (qui confia dans un livre de souvenirs sa passion pour Maurice Utrillo) coulait des jours heureux parsemés d’inévitables fugues, mais il avait échappé à la violence qui déchirait le trio Valadon, Utter, Utrillo. L’œuvre de ce dernier tient du miracle. Jamais, Maurice Utrillo ne se remit de l’immense amour qu’il nourrira toute sa vie pour sa mère, la voir coucher à tort et à travers, et avec son ami Utter, lui brisera à jamais l’âme et le cœur, et l’entraînera au fond du trou de l’alcoolisme et de ses délires ravageurs. On peut parler d’Utrillo le martyr. Oui, Suzanne sa mère martyrisa le pauvre Maurice. Lucie Valore le préserva un temps. Il est de bon ton pour les ignorants de la caricaturer. La Pinacothèque est un lieu inquiétant et désagréable. On a de la peine, même pour le temps d’une exposition à y survivre. On passe, bousculé de toutes parts d’un vestibule à un corridor. On aboutit parfois dans une impasse, dans un cul-de-sac.
On entend les propos idiots d’un public de barbouilleurs et de barbouilleuses du dimanche. C’est beau. C’est joli. C’est bien fait. Et bien, non, c’était plutôt moche. Des paysages de Montmartre verts ou bruns. Alors que chacun le sait, le meilleur d’Utrillo est dans la période blanche. Il y eut beaucoup de faux. Utrillo fut un des peintres du XXe les plus truandés par des faussaires. D’où viennent ces toiles aux couleurs bizarres ? Il serait drôle qu’on ait fait défiler le tout Paris devant des copies. Quelle blague ! Si aujourd’hui, je m’intéresse à la peinture, je le dois à la visite d’une rétrospective Utrillo organisée au Musée de Brou, en 1963. La Pinacothèque est un espace douloureux. J’étais avec mon ami Bernard Clarisse qui n’aime pas Utrillo et Valadon. Il a le droit. Les œuvres de Valadon sont la démonstration qu’on peut avoir fréquenté les maîtres (Degas, Renoir, Toulouse-Lautrec, etc…) et ne pas réussir à autre chose qu’à les singer lourdement. Nous avons croisé Sylvie Carlier venue probablement en mission pour contrôler le bon accrochage des œuvres prêtées par le Musée Paul Dini. La Madeleine est un quartier bien agréable pour les gastronomes. A côté de Fauchon, il y a le Paris London. On y mange de bonnes entrecôtes. Je vous le recommande vivement.
Jusqu’au 15 septembre 2009
Valadon – Utrillo. De l’Impressionnisme à l’Ecole de Paris
Pinacothèque de Paris
28, place de la Madeleine – Paris 8e
01 42 68 02 01
Tous les jours de 10h30 à 18h
Tarif : 9€